Art & Design

ENSA Dijon

06.02.2015

Colloque / Journée d'étude

Écrire l’archive (2)

De 9h30 à 17h • Maison des Sciences de l'Homme, Université de Bourgogne, Dijon

Journée organisée par le Centre Interlangues, Texte Image Langage (Université de Bourgogne), avec le concours du Centre d’études canadiennes (Université de Bourgogne), l’École Nationale Supérieure d’Art (Dijon, Bourgogne) et l’Atheneum (Université de Bourgogne).

À l’occasion de deux journées d’études qui s’inscrivent dans les travaux du Centre Interlangues Texte Image Langage de l’Université de Bourgogne, nous proposons d’interroger le rapport à l’archive qu’entretient la littérature anglophone au cours des XXe et XXIe siècles. S’il s’est créé un dialogue riche et complexe entre le document de type mémoriel (écrit historique, archive, chronique, mémoire, témoignage) et l’œuvre littéraire, quelle est son incidence aujourd’hui sur la pratique de l’écrivain et de l’artiste tant au niveau de ses outils d’écriture (ressources / sources) qu’au niveau des cheminements épistémologiques vers lequel son œuvre semble tendre ?

En poésie si l’écriture assume la démarche archivistique, de quelle façon a-t-elle marqué de son empreinte l’activité du poète ? Par le biais de l’archive la poésie devient le lieu d’une sollicitation grandissante des ressources du langage en puisant en dehors des frontières de la poésie. Tout au long du XXe siècle, les dynamiques hypertextuelle et intermédiale de l’écriture (Muriel Rukseyer, Charles Reznikoff, William Carlos Williams, Ezra Pound, Marianne Moore, John Dos Passos) témoignent de l’interpénétration de l’expérience esthétique et de l’archive. Aujourd’hui la poésie contemporaine de langue anglaise peut se lire comme une conversation engagée entre poètes et les sites archivistiques qu’ils ont élus pour faire œuvre (Rosemarie Waldrop ou Susan Howe, Cole Swenson, Kenneth Goldsmith, Michael Heller, Damien Smyth, Caroline Bergvall, poésie de 9/11, etc.).

Pour le romancier, l’archive est un objet qui entre dans la production littérature et dans l’examen de ce qui la fonde. L’architecture de l’espace romanesque s’appuie tant sur les modalités mémorielles de l’archive que sur des formes monumentales qui la caractérisent. Aux côtés de la démesure encyclopédique célébrée dans le roman historique, chez des auteurs aussi différents que Paul Auster, Don DeLillo, William Vollmann, Michael Ondaatje ou Julian Barnes le roman contemporain nourrit notre façon de penser l’archive aujourd’hui. L’entreprise métaphorique du roman soulève la question de la représentation de la mémoire dans son rapport à la narrativité. Traces, palimpsestes et d’autres motifs archéologiques chez le romancier s’inscrivent dans cet examen renouvelé des racines du langage.

L’hybridation que suppose la rencontre de l’œuvre et du document archivistique se manifeste à travers les accents formels du discours pour ensuite faire apparaître l’infléchissement d’une culture mémorielle, objet d’étude chez le philosophe et l’historien que nous nous proposons de prolonger à travers nos questionnements. Les résonances de cette culture posent la question de la mutabilité du signe, de son déplacement vers un espace transgénérique et de sa réception. Des lieux pour entreposer, classer, conserver se métamorphosent au rythme de la progression des technologies nouvelles. Avec l’avènement de la numérisation survient la démocratisation de l’archive et on peut observer que ces sites se transforment pour devenir des lieux de mise en scène, de représentation, de display. L’archive institue ainsi un site vers lequel des écrivains font retour en délimitant un espace pour l’artiste et l’artisan, pour l’imaginaire et pour la fabrique. Nous nous intéresserons ainsi aux recoupements entre le modèle de l’archive en tant que « lieu social » et les limites qu’il suppose (P. Ricoeur), les dispositifs pour l’écriture que l’archive suscite et la dialectique entre réalité et fiction qui sous-tendent tous les gestes matériaux et discursifs qui la fondent. C’est ainsi que nous nous attacherons enfin à mettre en regard les mutations de l’écriture à la rencontre des expérimentations dans les arts où se mélangent performance et création de nouvelles modalités archivistiques.

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